Nouvelle Hollande. Quel est le secret d’une ville ? Alors que je la découvre en trépignant, alors qu’elle fait apparaître devant mes yeux tant de ses atours, je regarde les gens.
Il y a ceux qui, comme moi, voyagent seuls et prennent ainsi leur temps. Le temps d’observer le haut des immeubles, les trottoirs encombrés, attirant les klaxons quand par mégarde je traine un peu trop à prendre une photo.
Je me perds dans la ville, humant son ambiance, dégustant son âme. Bientôt les magasins m’apparaissent comme familiers, je reconnais ce restaurant de sushi et alors que je m’arrête dans ce parc aux ibis entreprenants, je me demande ce qu’il me reste.
Il y a quelques années, quand j’ai commencé à voyager, Internet balbutiait. Il y a encore plus longtemps, on disait qu’il fallait attendre 10 ans pour que quelque chose aux USA arrive en France. Les films sont en sortie mondiale, les séries télé arrivent au pire 10 mois plus tard. Partout où je me ballade, je vois un STARBUCKS (bon, profitons-en car la franchise ferme presque entièrement en Australie), un magasin ESPRIT, des montres Guess et des shampoings L’Oreal (et là, je cherche une blague avec « Je le vaux bien » mais je suis trop fatigué). Bref, même l’Occitane en Provence pointe le bout de son nez. Autant dire que le dépaysement en prend un coup. Internet est partout et fait que si on le souhaite on a accès aux infos de la maison. On a ses mails et on chatte comme si les amis étaient à la porte d’à côté.
Les seules affaires à ramener seront soit les mêmes que celles en France mais moins chères (et ça, à part les Kebabs, le Nutella et le Perrier, je ne vois pas ce qui pourrait être PLUS cher qu’en France), soit les produits pour touristes car par définition on les trouve pas ailleurs. Oui, la casquette Australia c’est fabriqué par des chinois, vendu par des chinois mais on ne trouve ça nulle part ailleurs.
Ce qu’on ne peut pas ramener mais qui change est bien entendu la nourriture. Sorti des fast food, on peut trouver une évasion mais qu’on ne pourra que raconter.
Cela m’amène aussi à ce qu’on peut ramener et que l’on fabrique : les photos. Nous avons la chance de ne pas voir les photos des autres mais si on devait recenser toutes les photos de la Tour Eiffel prises du Trocadero ou celles du grand pont de Sydney, ça en ferait une sacrée collection. Je regarde les photos prises et je me dis que certaines ne feront que quelques secondes dans ma vie quand je le reverrais de temps en temps. Ce matin, en voulant prendre en photo le mémorial des soldats disparus ANZAC je me suis rendu compte que j’avais laissé ma batterie dans son chargeur. Je me suis dit : j’y retourne ou pas ? Après tout ma mémoire peut bien faire fonction de projection perso. Mais j’oublierai ce qu’une photo pourrait me rappeler. Et au lieu de raconter, je pourrai montrer. Autant de souvenirs à partager. Si je veux montrer, ce n’est pas pour moi. La photo est un bel acte de partage, un témoignage de ce que nous retenons d’un évènement, la perception que nous en avons.
Elle est aussi une sorte de trophée. Quand on voyage seul, il faut souvent avoir recours à l’auto photo. Les couples voulant être immortalisés devant un monument qui sera encore là longtemps après que ce couple se soit perdu dans la vie. Aujourd’hui j’ai du prendre 4 couples en photos mais en échange on m’a souvent proposé de me prendre sur format numérique quand quelque âme charitable, voyant que je n’ai pas le bras de Mr Fantastic, me proposait de m’aider. Enfin, le côté unique des monuments n’est qu’une facette de l’âme d’une ville. Les habitants sont l’autre composante. Discussions de quelques minutes, regards, gestes font ce mélange unique.
Sydney est tout cela, avec bien trop de français à mon goût pour que mon dépaysement soit total. A force de les côtoyer, on a parfois cette pensée : lui, il est français. Entre le vendeur sur Manly, les voix entendues dans les magasins, dans les bars, on se dit donc que c’est là aussi une terre bien plus petite qu’avant sur laquelle nous vivons. Si, ados, on sautait de joie quand on entendait la langue de Molière, on maintenant les yeux au ciel en se demandant jusqu’où il faut aller pour fuir ses congénères. Ca aussi, c’est un autre voyage.
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